Un renouvellement des émissions politiques est-il possible ?
Quelques réflexions autour de l’intervention de Jacques Chirac sur le référendum, jeudi 14 avril sur TF1, non sur le fond (retranscription intégrale du débat par ICI), mais sur la forme (la vidéo du débat par LA).
Dès que le format de l’intervention de JC sur TF1 a été annoncé, une polémique s’est développée. D’un côté, les sociétés de journalistes de France 2, France 3 et M6 ont dénoncé dans un communiqué commun « le triomphe du marketing politique et de l’information spectacle au mépris du journalisme ». La présence de E Chain, JC Delarue et MO Fogiel , animateurs connus pour leurs talks-shows et non spécialistes de la politique (quand bien même fussent-ils journalistes) a été critiquée. On a également mis en doute la représentativité du panel de jeunes appelés à interroger JC, certains notant qu’ils constituaient un public plus facile que des personnes plus âgées qui, elles, auraient pu mettre le discours pro-européen en perspective.
D’autres au contraire se sont réjouis de ce que cette émission constituait un renouvellement du débat politique télévisé. Et c’est vrai que la politique à la télé a bien besoin d’être revalorisée. Mais comment faire ? Je ne suis pas sûr que le débat sur TF1 ait beaucoup contribué à renouveler le genre. Dès le départ, il y avait un défaut de construction : quel sens cela avait-il de rassembler 83 jeunes (à part dire qu’ils étaient représentatifs), sachant qu’ils ne pourraient pas tous intervenir ; à quoi bon quatre animateurs (à part le fait que cela a aidé à la publicité du débat) ? Quant à Jacques Chirac a-t-il vraiment joué le jeu ? On avait l’impression qu’il cherchait avant tout à placer des slogans ou formules, soigneusement préparés (le fameux « N’ayez pas peur »). Et, d’un point de vue psycho-sociologique, il n’est jamais très habile de stigmatiser ses opposants : généralement, cela les radicalise plus que cela ne les ébranle. Plutôt que dire aux partisans du Non que la France va devenir « le mouton noir de l’Europe »à cause d’eux, il serait sans doute plus malin de partir de leurs manières de voir et de leur demander comment, pratiquement, au lendemain d’un vote Non on va construire une autre Europe, qui conserve les points positifs du traité constitutionnel.
Les émissions politiques constituent un genre mineur à la télévision. Leurs audiences sont modestes (de 2 à 6 millions de téléspectateurs pour une émission aux heures de grande écoute) et leur public est très masculin et âgé (plus de 70% des téléspectateurs qui regardent 100 minutes pour convaincre, l’émission politique phare de France 2 ont plus de 50 ans !). Malgré quelques tentatives (dont l’émission Ce qui fait débat animée par Michel Field sur France 3 en 2000-2001, où la parole était donnée en direct à des gens rassemblés dans des cafés de province), ce sont toujours les deux mêmes formats qui reviennent avec quelques variantes : le face à face entre deux ou plusieurs responsables politiques de bord opposé ; le face à la presse, parfois entrelardé de reportages et mâtiné d’interventions de gens, censés représenter les citoyens.
Cette dernière voie est sans doute intéressante à explorer, sachant que l’intervention du public peut sans doute rafraîchir le débat politique, mais n’y suffit pas. En Grande-Bretagne, l’émission Question Time sur la BBC offre un bon exemple de la manière dont des responsables politiques peuvent être confrontés à un panel de téléspectateurs. Mais plusieurs ingrédients sont nécessaires pour qu’une émission politique fonctionne bien : avant tout qu’elle dispose de la durée pour s’établir et s’améliorer progressivement ; que quelques règles simples de discussion soient fixées ; un animateur expérimenté, pugnace et peu impressionnable...
mardi 19 avril 2005
Chirac et le référendum sur TF1
Thèmes : Débats politiques
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