jeudi 29 septembre 2005

Usages et techniques terroristes sur Internet

Le Monde du 28 septembre publie un article sur les usages terroristes de l'internet, à partir d'un rapport rédigé par Gabriel Weimann pour l'United States Institute of Peace.
Ce rapport distingue 8 types d'usage: la guerre psychologique, la publicité et la propagande, l'extraction de données (data mining), la collecte de fonds, le recutement et la mobilisation, le networking (le réseautage comme disent les Québécois), la dissémination de conseils et de savoir-faire, la planification et la coordination d'actions.


Image du site d'al Qaeda qui montre un ordinateur brisé

En parcourant l'article du Monde, je me suis souvenu que j'avais déjà lu cela il y un petit moment, en mars 2004 exactement, date de la parution du rapport! Le Monde semble un peu long à la détente, mais bon, l'article fait un résumé très correct du rapport.
Y compris en reprenant les erreurs qu'il contient (par exemple au sujet des origines de l'internet, qui contrairement à ce qu'on raconte souvent, n'est pas directement né de préoccupations militaires, mais résulte plutôt d'un entremêlement de logiques universitaires (voir ICI le résumé de la thèse soutenue en 2000 par Alexandre Serres sur le processus d'émergence d'Aparnet, l'un des meilleurs travaux en langue française sur le sujet).


mercredi 28 septembre 2005

En direct d'Issy: le vote électronique

Ce matin au Forum E-démocratie d’Issy-les-Moulineaux, le Club de l’hyper-république organisait un une table-ronde sur le vote électronique. Petit compte-rendu à chaud.

L’intervention principale a été celle de Yannick Blanc, sous-directeur des affaires politiques et de la vie associative au Ministère de l’intérieur. YB a d’abord rappelé qu’après la délibération de la CNIL du 1er juillet 2003 et la recommandation du Conseil de l’Europe du 30 septembre 2004, il y a un large consensus sur les principes qui doivent régir le développement du vote électronique, à savoir : agrément officiel ET expertise indépendante des technologies ; séparation des données nominatives et des votes ; chiffrement fort de l’ensemble du système de vote ; inviolabilité du système ; surveillance effective du scrutin ; protection de l’ouverture et de la fermeture du scrutin ; conservation des données. (Ce dernier principe constitue un changement qui n’est pas anodin par rapport aux pratiques actuelles de destruction des bulletins après proclamation des résultats. Il vise à permettre la vérification des opérations électorales en cas de contestation, mais on peut se demander s’il ne fait pas peser un risque, certes minime pour l’instant, sur la confidentialité du vote - au cas où dans X années quelqu’un récupérerait les archives de nos votes passés).


Machine à voter utilisée au Brésil et machine à voter France Télécom (démo vidéo)

Le ministère de l’intérieur prépare actuellement un projet de loi révisant le code électoral, qui sera présenté vers la fin de l’année et permettra la mise en oeuvre effective d’un vote électronique. Si j'ai bien compris, le Ministère de l’intérieur a retenu l’option "machines à voter" et on "vote à distance". En revanche, je n'ai pas très bien saisi si ces machines à voter seront complètement autonomes ou bien reliées à une plateforme centrale.
Pour info, le projet E-Poll de France Télécom qui a été expérimenté à Issy-les Moulineaux le 19 mai 2005 et lors des élections des conseils des universités de Nantes et de Lyon en novembre 2004 comporte des terminaux en réseau : officiellement il s’agit de permettre à chacun de voter dans n’importe quel bureau de vote, mais on peut aussi se souvenir que le métier de FT est d’abord de vendre du réseau plus que du logiciel.
(Je reviendrai une autre fois sur les élections de Lyon et de Nantes. Mais il semble que l’impact du vote électronique sur la participation ait été minime : + 3% à Nantes et +6% à Lyon malgré une grosse campagne d’invitation au vote . En attendant, pour avoir une idée des réactions des étudiants nantais – pas hostiles, mais pas des masses convaincus non plus,vous pouvez jeter un coup d’œil sur le blog Campus nantais).

Le second intervenant, Michel Hunault, député de Loire-Atlantique, a commencé par regretter une certaine frilosité de l’administration en souhaitant qu’on aille plus loin que de simples machines à voter (dans la suite du débat, il sera plus nuancé). Il a repris les arguments de sa proposition de loi (bien succincte) visant à autoriser le vote par internet. Celui-ci est conçu comme devant faciliter le vote des personnes à mobilité, des étudiants à l’étranger, bref de tous ceux qui ne peuvent pas se déplacer, et comme de nature à réduire l’abstentation, analysée comme résultant de difficultés matérielles (ce qui est assez réducteur). Rien sur les problèmes techniques (la proposition de loi renvoie les modalités d’application du vote par internet à un décret du Conseil d’Etat). L’idée générale est que l’internet se diffuse rapidement dans la société, notamment chez les jeunes, et qu’il n’y a aucune raison qu’il n’en soit pas de même pour les élections. Un peu court quand même.

Troisième intervention, du type service commercial minimum, celle de Ülle Madise du Parlement estonien. En Estonie, le cadre réglementaire a été modifié pour permettre la généralisation du vote par internet, notamment pour faire évoluer la conception du secret du vote (défini non plus comme une fin en soi mais comme un moyen) autour de l’idée d’isoloir virtuel. La parade trouvée pour résoudre le problème des pressions éventuelles sur les électeurs, toujours possibles en cas de vote depuis son domicile, consiste à permettre de changer son vote jusqu’à la fin du scrutin. Ainsi, si papa vous oblige à voter pour le parti A, vous pouvez toujours filer en douce dans un café internet pour changer votre vote pour le parti B.
On notera aussi que la carte que les électeurs estoniens utilisent est une carte citoyenne multi-services qui sert pour d’autres prestations administratives. (Imaginez un peu les choses si on votait en France avec notre carte Vitale). Enfin, Ülle Madise a fourni quelques résultats de sondages qui montrent que les internautes , surtout les jeunes, sont en faveur du vote électronique, mais pas tant que ça quand même (38% et 44% chez les utilisateurs quotidiens de l’internet versus 14% chez les non-internautes).

Vint ensuite l’ami Pierre de la Coste, président du Club de l’hyper-république, qui est revenu sur le système de color vote expérimenté par les membres du club lors du référendum. (Je reviendrai dessus une prochaine fois).PdlC a également annoncé le lancement d’un appel mondial pour le développement d’une démocratie électronique libre, basée sur des logiciels Open source.

Pour terminer, Frédéric Maillard, président de l’association Communication et démocratie (le lobby plutôt intelligent, des publicitaires dans le domaine politique mais je n’ai pas trouvé son site) a fait un topo assez schématique sur la désaffection des citoyens à l’égard de la politique. Tout irait mieux si on autorisait la publicité durant les campagnes, si on modernisait véritablement les émissions officielles de la campagne télévisée et, bien sûr si on pouvait voter par internet. Plutôt qu’une faible participation électorale, nous dit FM, mieux vaut une fast-démocratie (expression pas très heureuse).

Auto-pub : Avec mes collègues du Groupe démocratie électronique du CNRS, nous organisons le 7 décembre . une journée d’étude sur « Démocratie et dispositifs électroniques : regards sur la décision, la délibération et le militantisme ». Si vous souhaitez y participer, faites-moi signe. Nous y parlerons du vote électronique et je reviendrai sur le sujet (notamment sur les oppositions montantes à l’égard du vote électronique) dans le blog à ce moment là.

mardi 27 septembre 2005

Comme un nom d'ouragan

En ce moment, les petites Katrina et Rita ont bien du chagrin car leurs copines se moquent d’elles et n’arrêtent pas de les traiter d’ouragans. Comme le note avec amusement Phersu sur son blog, cela ne serait pas arrivé si leurs parents avaient consulté la liste des noms donnés, plusieurs années à l’avance, aux cyclones par le National Hurricane Center de Miami: ainsi, si vous attendez un bébé pour 2006, mieux vaut éviter de l’appeler Alberto ou Michael si c’est un garçon, Florence ou Hélène si c’est une fille (depuis 1979, et sans qu’on sache très bien si c’est une victoire des féministes ou des machistes, les cyclones ont en alternance des noms de filles ou de gars alors qu’ils étaient uniquement féminins auparavant).


Alberto, le cyclone

Le choix des prénoms ne suit pas seulement des modes, il révèle également l’origine sociale ou ethnique, ou encore la religion que l’on pratique. Ainsi, à New-York, un petit garçon qui s’appelle Michael sera sûrement blanc, hispanique s’il s’appelle Justin, noir s’il s’appelle Joshua et asiatique s’il s’appelle Jason (d’après les recensements du NYC Dept of Health de 2004.
En France, Philippe Besnard, qui était directeur de recherche au CNRS et fut directeur de l’ Observatoire sociologique du changement à Sciences-po de 1996 à 2001, a mené de passionnants travaux sociologiques sur le choix des prénoms. Il a ainsi montré que, jusqu’au début des années 1970, les différences sociales se traduisaient par des décalages temporels dans le choix des prénoms: la haute bourgeoisie et l’aristocratie lançaient de nouveaux prénoms qui, ensuite, se diffusaient dans le reste de la société.
Depuis les années 1980, cette diffusion verticale a quasiment disparu et l’on observe une véritable polarisation sociale des préférences : il y a des prénoms bourgeois et des prénoms populaires. Au cours des dernières décennies, les milieux populaires ont fait preuve d’une plus grande innovation dans le choix des prénoms (notamment en important des prénoms américains, probablement sous l’influence des séries télévisées) alors qu’au début du siècle les prénoms étrangers étaient surtout adoptés par les classes sociales aisées. Par contraste (et sans doute réaction), les milieux bourgeois tendent à se réfugier dans la tradition en réhabilitant de vieux prénoms français.


Pour aller plus loin :
Besnard, Philippe, “Pour une étude empirique du phénomène de mode dans la consommation des biens symboliques : le cas des prénoms”, Archives europeénnes de sociologie, 1979, vol.20 p. 343-351.
A partir de 1986, Phillipe Besnard a, avec son collègue Guy Desplanques, publié un inventaire annuel des prénoms les plus adoptés La Côte des prénoms (repris, depuis son décès en 2003, par sa fille Joséphine - et non Josette comme je l'ai écrit d'abord, obnubilé par mon précédent billet - Besnard). Un des rares exemples d’application pratique et grand-public des sciences sociales.

lundi 26 septembre 2005

L'hôpital psychiatrique vu du ciel

Depuis deux ans, l'unité des malades difficiles de l'hôpital Paul Guiraud de Villejuif est en travaux, ce dont elle a bien besoin puisqu'elle n'avait pas été réhabilitée depuis 1910 (pour avoir une idée de ce à quoi cela ressemblait, on peut lire cet édifiant reportage paru dans l'Humanité du 18 novembre 1998).

Mais la nouvelle configuration semble ne pas répondre du tout aux besoins de ses usagers. C'est Josette Van de Kerkove, une infirmière de l'unité, qui le raconte dans le beau portrait que lui consacre le Libération du 26 septembre.
Alors que "dans l'ancienne structure, les patients disposaient d'un parc (...), desormais ils prennent l'air dans de petites cages ouvertes sur le ciel". Les arbres ont été déracinés. "L'architecte nous a dit qu'une fois finie, l'unité serait très harmonieuse vue d'avion" ajoute Josette.


Vue aérienne de l'hôpital Paul Guiraud à Villejuif

Josette touche à un problème qu'on retrouve dans de nombreux projets d'aménagement urbain ou d'équipements collectifs. Ceux-ci paraissent beaux et bien conçus lorsqu'on les regarde d'en haut, mais à ras de terre, ils sont peu pratiques et ne correspondent pas aux besoins ou aux habitudes des gens. Alors pourquoi s'entête-t-on à penser nos villes, nos lieux de travail ou de vie, depuis le ciel? Tout simplement parce qu'une opération d'urbanisme doit d'abord être validée par des décideurs politiques, et que ceux-ci se déterminent le plus souvent en fonction de plans de masse ou de maquettes qu'ils regardent d'en haut.

samedi 24 septembre 2005

Débat autour de L'Europe bloguée

Depuis quelques jours, plusieurs blogs font un sort à une tribune libre intitulée l’Europe bloguée, parue dans le Libération du 20 septembre et signée de Philippe Jeanne, responsable de la filière change Natexis Banques populaires (ce dont, au passage, on se fiche pas mal).
Ce papier, qui n’est pas des mieux écrits et part dans tous les sens, semble être un plaidoyer pour un pragmatisme à la Tony Blair.
Il parle aussi des blogs. Extrait :

" La mode est aux blogs, aux forums, qui permettent à chacun d'exprimer son avis et de piocher ce qui lui plaît dans les étalages d'opinion qui lui sont offerts. Une vraie mode en effet, qui frappe tous les secteurs, de la politique à l'économie, du social à l'humanitaire, de la science aux arts, et assouvit une aspiration à plus de liberté en offrant des choix nouveaux. Mais aussi en laissant croire que tout est possible, que l'on peut prendre ici ou là un article ou deux dont on se sent proche, d'une idéologie ou d'une théorie économique, en laissant les autres qui nous correspondent moins. Chacun se forge une croyance, puise ses sources à droite ou à gauche sans se soucier de la cohérence d'ensemble, encore moins du dogme qui la sous-tend. Le global ne paie plus, et l'on voit l'adhésion politique s'effriter, quand le détail prend le pas sur le général. Plus l'opinion individuelle est tranchée, plus elle a de mal à s'identifier à un courant, à un parti. Ce morcellement de l'opinion rend les sondages plus incertains, les indicateurs statistiques moins valides, qui ne reflètent qu'une moyenne sans mesurer les écarts qui s'amplifient par rapport à elle".

Ces quelques lignes ont énervé pas mal de blogueurs (voir par exemple le passionnant débat sur Publius ICI, en particulier la contribution d’Eric Lauriac du 22 septembre, ou encore cet intéressant billet sur le blog Versac.

En dépit du caractère confus de son propos, il me semble que Philippe Jeanne soulève deux questions importantes :

- les blogs, et plus généralement l’internet, ne favorisent-ils pas une pensée à la fois syncrétique (en ce qu’ils favorisent la combinaison d’éléments hétéroclites) et centrifuge (de par les liens hyper-texte qu’ils offrent, qui sans cesse éloignent la réflexion de son objet initial) ?

- n’assiste-t-on pas à une consumérisation de la politique? Sous l’influence du néo-libéralisme et du nouveau management public, l’Etat n’est plus conçu comme une autorité supérieure dont le fonctionnement est commandé par une logique de l’intérêt général construite dans l’espace public, mais comme une agence de prestations qui sert des intérêts particuliers se formant dans la sphère privée. D’où une tendance, dans les conversations politiques, à une exacerbation des opinions individuelles qui rend plus difficile la construction d’une raison collective.

vendredi 23 septembre 2005

Guide pratique du blogger et cyberdissident / Handbook for bloggers and cyber-dissidents

Nouveau et intéressant : Reporters sans frontières (RSF) vient de publier un Guide pratique du blogger et du cyberdissident.
Ce document de 86 pages contient d’utiles informations pour créer, organiser et faire connaître son blog, accompagnées de témoignages de blogueurs de diverses parties du monde. De façon plus originale, il donne des conseils et astuces techniques très précis pour bloguer de manière anonyme, contourner la censure qui existe dans certains pays ou encore assurer la confidentialité de ses e-mails.

S’il ne fait de doute que les blogs sont un « formidable outil pour la liberté d’expression », tout particulièrement là où les pouvoirs en place cherchent à la limiter ou encore là où les médias traditionnels en font un piètre usage, on pourra reprocher à RSF d’idéaliser quelque peu les blogs. Outre le fait que les blogs politiques ou citoyens restent très marginaux par rapport aux blogs intimistes ou nombrilistes de tout poil (ou aux pseudos-blogs des sociétés marchandes – aux Etats-Unis, même Wal-Mart a son blog, c’est dire !), la multiplication des blogs ne signifie pas nécessairement une meilleure information, plus diversifiée ou plus approfondie. Nombre de blogs (à commencer par le mien) retraitent surtout les informations des médias traditionnels et il ne suffit d’ouvrir un blog pour devenir un journaliste, même en pyjama. Le guide de RSF n’aborde que brièvement cette question sous la forme d’un court chapitre intitulé « Quelle éthique pour les bloggers ? » rédigé par Dan Gillmore, fondateur de Grassroot (une entreprise qui cherche à promouvoir le journalisme par les gens) et animateur du blog Bayosphere. C’est tout l’enjeu des blogs citoyens : comment peut-on faire pour que ceux-ci ne soient pas seulement l’expression en abîme d’opinions individuelles mais permettent également l’invention collective d’un journalisme par les gens pour les gens ?



Le guide est disponible en 5 langues:


“Bloggers are often the only source of information in countries where the mainstream media is censored or under pressure. In order to help bloggers around the world, Reporters Without Borders (Reporters sans frontiers RSF), a French organization for the defence of journalists, has issued a 86 pages guide for bloggers and cyberdissidents. It explains how to set up and make the most of a blog, to publicise it (getting it picked up efficiently by search-engines). It also contains handy tips and technical advice on how to remain anonymous and to avoid censorship, by choosing the most suitable method for each situation" (edited from the RSF site).

This guide is a very good idea and is quite useful. Yet, besides the fact that political or citizen blogs remain a very small part of the blogosphere, it tends to idealize blogging. Starting a blog does not mean that you become a reporter overnight and many blogs (including mine) just process information produced by mainstream media. Even though the RSF guide has a section on bloggers’ ethics, it does not really address how blogs can promote the invention of a new journalism by people and for the people.

mardi 20 septembre 2005

6 eme Forum mondial e-démocratie

Pour la 6eme année consécutive, Issy-les-Moulineaux organise les 28 et 29 septembre son Forum mondial e-démocratie.





Il est encore temps de s'inscrire (gratuit pour les lycéens, étudiants, professeurs, chômeurs et habitants d'Issy).
Le programme et l'inscription en ligne sont PAR ISSY.
On en reparle après coup.

The sixth edition of the Worlwide forum on e-democracy will take place next week in Issy-les-Moulineaux, a city in Paris suburbs.
To take a look at the programme in English, click HERE.

lundi 19 septembre 2005

Comment faire croire qu'on a gagné quand on a perdu?

En 1998, dans les bureaux de l’équipe de campagne de Gerard Schröder, on pouvait lire cette affiche : « In 4 Wachen machen wir es genausa. Herslichen Glückwunsch, Tony Blair » (Dans 4 semaines, nous ferons pareil. Bravo à Tony Blair ). Et, en effet, les responsables du SPD semblent désormais aussi bien maîtriser les techniques du spin que leurs homologues britanniques.

Le spin, c’est un ensemble de techniques visant à modifier la manière dont les médias perçoivent un événement. L’une des ces techniques consiste à focaliser l’attention des médias sur une prévision négative quant aux résultats de l’élection à venir, cette prévision (et non les résultats de la précédente élection) devenant ainsi le point de référence utilisé par les médias pour évaluer les résultats effectifs. On peut alors minorer ses pertes, voire les transformer en gains.

Ainsi, lors des élections locales britanniques de 1991, les responsables de la communication du parti conservateur ont, sur le ton de la confidence, fait part aux journalistes de leur extrême inquiétude : la situation était tellement catastrophique que les Tories craignaient même de perdre deux villes-symboles, Wandsworth et Westminter, qui avaient toujours voté pour eux. Le lendemain de l’élection, de nombreux journaux ont titré sur le fait que les Tories avaient conservé ces deux villes, mettant au second plan les 500 sièges conquis par le Labour et les 900 perdus par les Tories !

Autre exemple : en 1992, lors de la primaire du New Hampshire, les experts électoraux du parti républicain ont exagéré le danger que représentait pour George Bush la candidature de Pat Buchanan (un éditorialiste ultra-conservateur entré en politique), et indiqué aux journalistes que celui-ci risquait d’obtenir au moins 40% des votes, et peut-être même sensiblement plus. Lorsque Buchanan n’obtint finalement que 37% des voix, ce résultat fut interprété par la plupart des journalistes comme une défaite de Buchanan (alors même qu’un président sortant avait été rarement aussi chahuté dans la primaire du New Hampshire). Et ceci affecta négativement la dynamique de sa campagne par la suite (d’autant plus que la primaire du New Hampshire est perçue par les médias comme déterminante pour la suite du processus électoral).


La lotion magique de Schröder / Schröder's magic lotion

Make them believe you won after you lost.
One of the technique frequently used by spin doctors consists in focusing media attention on negative expectations. Then, by just beating these expectations, you become a winner even though you actually lost.
For example, in the run-up to polling day of the 1991 British local elections, the Tories spin doctors managed so well that it seemed that the only two results to watch were those in Wandsworth and Westminter. The following day, most newspapers had headlines such as “Conservatives hold Westminter and Wandsworth”, instead of “Conservatives loose near 900 seats”.
In another instance, during the 1992 primary in New Hampshire,Republican spin doctors suggested that Pat Buchanan, the right-wing opponent to George Bush would get at least 40% of the votes, and might even get more. By talking up Buchanan’s chances, the effect was to make media people think that Buchanan had done poorly when he eventually got about 37% of the votes.This helped to boost Bush campaign and considerably damaged the momentum of the Buchanan campaign.

jeudi 15 septembre 2005

Orange: la couleur politique à la mode

Vous l'avez sans doute remarqué: l'orange est à la mode en politique. Cela semble avoir commencé avec la révolution orange en Ukraine. Depuis les élections européennes de 2004, l'UDF s'habille également en orange. Lors des élections de juin dernier au Liban, l'orange a été la couleur du Parti Patriotique Libre dit “Aouniste", et quelques-mois plus tard, les opposants israéliens à l'évacuation de la bande de Gaza ont également adopté l'orange. Aujourd'hui, c'est l'opposition en Azerbaïdjan qui se pare d'orange.


Orange revolution?

Ceux qui s'y connaissent en symbolique ou en psychologie des couleurs (par exemple par ICI) nous disent que l'orange n'est pas un marqueur très fort (d'ailleurs, peu d'expressions utilisent cette couleur): il évoque quelque chose de stimulant, et il plait, paraît-il, aux gens d'action, compétents et plutôt impatients.
Dans le marketing commercial, l'orange, plutôt délaissé dans les années 90 comme trop réminiscent des années 70 (durant lesquelles il était atrocement mélangé au marron - mon ancienne cuisine en portait les stigmates), a fait récemment un retour en force sans que sa signification soit très claire: il tendrait à signaler les services ou produits bon marché (cf. EasyJet) mais il est également utilisé par l'opérateur téléphonique du même nom, par Mathieu Chedid pour le packaging de son CD Je dis Aime, et par tous les marchands du temple lors d'Halloween.

Pour vous amuser avec les couleurs, un site intéressant : pourpre.com

mardi 13 septembre 2005

Ceux qui font l'école ont-ils la parole?

Si vous avez écouté Europe 1 hier, vous avez peut-être entendu un curieux spot publicitaire de 15 secondes: après un jingle entêtant (mais énervant après plusieurs écoutes), des témoignages du type micro-trottoir, puis une voix féminine qui vous invite à aller sur le métier d’enseigner point fr, « le site où ceux qui font l’école ont la parole », enfin une voix masculine qui précise qu’il s’agit d’une initiative du SNES.

Le SNES, c’est le syndicat national des enseignants de second degré, largement majoritaire lors des élections professionnelles (envron 38% des voix). A ma connaissance, c’est l’une des toutes premières fois en France qu’un syndicat fait de la pub à la radio. Intéressant. Allons donc faire un petit tour sur lemetierdenseigner.fr


Pub pour le site lemetierdenseigner.fr
Cliquer dessus pour le voir en détail


On arrive sur une gentille page d’accueil, claire et colorée. Colonne de gauche, les intitulés des rubriques du site : Questions-réponses, Radio (qui rassemble des séquences téléchargeables d’une émission de radio maison – actuellement sur le thème des inégalités sociales à l’école), Chat, Dossiers, Idées-reçues, Newsletter, Avis de recherche (pour retrouver un ancien collègue), Appel à témoigner.
Colonne centrale : les titres de témoignages de profs répartis en 3 groupes (jeunes profs, professeur confirmé, CPE Co-Psy et autres). On clique dessus et une vidéo se lance.
Colonne de droite : reprise développée en petits chapeaux des rubriques de gauche et, en bas, un sondage (la rentrée 2005 vous apparaît-elle facile, difficile, sans avis ?).


Page d'accueil du site lemetierdenseigner.fr .
Cliquer dessus pour y accéder

En poursuivant ma visite du site, j’ai été cependant quelque peu déçu. Passons sur le fait qu’il semble avoir été ouvert alors qu’il n’était pas encore totalement prêt (plusieurs des rubriques annoncées ne fonctionnent pas). Ce qui me frappe, c’est que ce site semble surtout donner la parole aux militants du SNES. Les témoignages proposés, bien ficelés tant sur le plan du contenu que de la mise en image, ont été visiblement conçus par le syndicat lui-même. Et, pour l’instant, on a plutôt affaire à une sorte de tract vidéo-électronique, présentant de façon vivante et astucieuse les positions du SNES, et pas vraiment à un véritable forum où chacun peut s’exprimer avec ses mots et son style. Certes, on peut imaginer qu’il s’agit d’amorcer ainsi la discussion, mais une plage blanche à remplir par les visiteurs aurait été tout aussi stimulante et bien plus symbolique du désir du SNES de laisser la parole à ceux qui font l’école.

Au total: un bont point pour cet effort assez rafraîchissant de renouvellement de la communication syndicale; mais peut bien mieux faire en matière d'expression libre et directe.


lundi 12 septembre 2005

Aljazeera launches a children channel

On September 9, 2005, Aljazeera, the pan-arab broadcasting group, inaugurated a new channel devoted to children, known as JCC.
Based at the Education City in Doha, the capital city of Qatar, JCC, with a staff around 235 people, will provide a mix of entertainment and educational programs (termed as edutainment) to children from 3 to 15. It will be broadcast, free of charge, through the Arab world via Arabsat and Nilesat satellites, and throughout Europe via Hot Bird satellites.


Shaikha Mozah, at the inauguration of JCC

I have mixed feelings about this project. When I read the presentation of JCC on Aljazeera.net, I find it very nice. And I like the statement made by Mahmoud Bouneb, JCC’s executive general manager : "We will try to present something which is a balance between the need of a child to be part of a social tissue and the need of a child to be a child. This is our priority, a child is a child. But let's prepare him to be a good citizen and a constructive citizen and a positive citizen."
I also like when Shaikha Mozah, the wife of the emir of Qatar and apparently the key person behind the venture, says that "this channel is a bridge for communication between Arab children and children around the world".

I am more puzzled when Mozah adds, according to The Peninsula, the main Qatar daily in English, that "because education and information are basic complementary options, the idea was to employ another field among the spheres of influence and information, which established their ability to change minds and mobilise selves in order to link means and windows of knowledge to accompany children in the formal and informal atmosphere, thus help protect their minds and help them grow their common sense and prepare them for the future without suffering of cultural shocks or psychological stresses".

I really don't know what kind of programming this is going to result in. We might get a clue by noting that the French Lagagdère group, whic runs the children channel Canal J in France, will help JCC in the production of fresh programming. Surprisingly, no information was avalaible on Lagardère web site, as of today.

samedi 10 septembre 2005

Stay Tuned

Un billet rapide, écrit sous le regard du bon vieux Karl, pour vous envoyer un amical salut de Budapest. Le blog reprendra de manière plus active dès lundi.

Statue de Karl Marx à l'Université Corvinus
This is just a quick note (written next to the statue of our old buddy Karl, to say hello from Budapest. More on this blog from next Monday on.

mardi 6 septembre 2005

Un petit moment d'émotion...

Allez faire un tour sur le blog de David Fenech
par ICI
David est un grand pêcheur de perles.



Je crois entendre encore
Caché sous les palmiers
Sa voix tendre et sonore
Comme un chant de ramiers...

samedi 3 septembre 2005

Rage and tears: La colère et les larmes du maire de la Nouvelle-Orléans

Ecoutez cette extraordinaire interview de Ray Nagin, le maire de la Nouvelle-Orléans, réalisée le 1er septembre 2005 par Garland Robinette de la station radio AM 870 WWL de la ville.

Les deux dernières minutes (à partir de 12'01) sont particulièrement émouvantes.

Ecouter l'interview /Listen to the interview (MP3)



jeudi 1 septembre 2005

Blogs de catastrophes

Désormais dès qu'un événement tragique (catastrophe naturelle, attentat, etc.) survient, des centaines de blogs apparaissent autour de cet événement(*). On l'a vu lors des tsunamis, puis des explosions dans le métro de Londres; on le voit aujourd'hui avec le cyclone Katrina.


Neworleansrefugees.blogspot.com

Si l'on y regarde de plus près, on peut distinguer trois types d'utilisation des blogs en pareil cas:
- Les blogs peuvent servir de boites à lettres publiques qui permettent, dans une situation de désorganisation des communications, de lancer des appels à l'aide, des avis de recherche, ou de rassurer parents et amis.
- Les blogs forment également également une sorte de journal collectif de la tragédie où chacun peut exprimer ses angoisses, dire sa tristesse ou lancer des coups de gueule.
- Il y a enfin les blogs des apprentis reporters qui, armés de caméras numériques ou tout simplement de leur téléphone portable, rendent compte de ce qui se passe, enregistrent les témoignages ou commentent. Du coup, les grands médias (main stream medias comme disent les blogueurs) sont obligés d'en tenir compte. Par exemple, CNN a ouvert une rubrique Citizen Journalist, présentant les nouvelles racontées par les gens et même une galerie des photos que les gens ont prises.

(*) Du moins quand ces événements surviennent dans la partie occidentale de la planète. Le phénomène des blogs de catastrophes reste pour l'instant très occidental.

Every catastrophe or disaster now generates thousand of blogs. These can be broken down into three main genres:
  • blogs may serve as public mail-boxes which allow communications between individuals;
  • they also form a sort of collective diary for the public expression of emotions;
  • other blogs are akin to traditional media as they are aimed at providing fresh information, including pictures of events, updates and comments.

Quelques liens :

Une recension par Technorati des blogs autour de Katrina.

Le dossier de Libération "Quand M. Tout-le-monde s'improvise reporter", paru dans l'édition du 20-21/08/2005.

Mon billet du 2 janvier 2005 sur ce blog: Nous sommes tous des journalistes.